"J’ai la chance d’avoir eu une enfance voyageuse, aérienne comme un palmier. Mais je n’ai pas connu d’odyssée plus intense que celle de parent. Le bonheur et l’exigence d’être un père dans une époque où tout se consommait : les histoires d’amour, les mariages, les divorces, les égo. Une époque aussi où tout se consumait : le sacré, les forêts, la mémoire et même les livres.
L’enfance est un paquebot. Il faut prendre la mer malgré les tempêtes. Où vont les fils ? se demandent les pères inquiets de les perdre de vue sur la ligne d’horizon."
Olivier Frébourg.
"J’ai la chance d’avoir eu une enfance voyageuse, aérienne comme un palmier. Mais je n’ai pas connu d’odyssée plus intense que celle de parent. Le bonheur et l’exigence d’être un…
'Mais moi, quand je ferme les yeux, je descends d'abord comme un noyé dans les eaux limoneuses du fleuve Chari, qui trace la frontière
entre le Tchad et le Cameroun, où furent jetés tant d'hommes, de femmes et même d'enfants, parfois encore vivants, les mains ligotées dans le dos ou enfermés dans une gibecière. Je sombre avec eux vers le sable et l'argile, au milieu du vert et du brun, croisant des algues violettes, des tessons de poteries et des écailles de crocodile. Ma tête est plus lourde qu'un boulet et m'entraîne vers les abysses : je plonge
dans un sac sans fond où les lettres s'entrechoquent ou s'esquivent, s'appellent ou s'ignorent, je baigne dans un espace illimité soustrait aux contraintes des cycles et des dates, et j'entre dans le temps de l'enfance qui précisément ne connaît pas le temps.
Tous mes souvenirs s'envolent dans le vent des sables, le passé coule dans le fleuve, se joue dans les branchages, explose dans les feuillages. Le passé est tout autour de moi désormais – et je ris quand je dis "le passé", car rien de tout cela n'est passé.'
Michaël Ferrier.
'Mais moi, quand je ferme les yeux, je descends d'abord comme un noyé dans les eaux limoneuses du fleuve Chari, qui trace la frontière
entre le Tchad et le Cameroun, où furent…